Le SDAAM, un Outil Stratégique pour la Métropolisation d’Oran ?

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Par Youcef KADRI
Doctorant au département d’architecture,
Université des Sciences et de la Technologie d’Oran – Mohamed Boudiaf

 

Le phénomène de métropolisation connaît un renforcement notable depuis les années 80, parallèlement au procès de mondialisation de l’économie, de l’avis des responsables des métropoles internationales. Dans le domaine de la recherche scientifique, géographes, démographes, économistes, urbanistes et sociologues s’accordent pour considérer que la métropolisation est le processus par lequel une ville acquiert les fonctions majeures de coordination d’activités économiques complexes de portée mondiale (Ascher, 1995). Elle est alors la transformation la plus significative du milieu urbain et du territoire. Dans ce contexte de métropolisation des grandes villes contemporaines et de leur mise en concurrence, bien au-delà des frontières nationales, la pratique de la planification connait des changements significatifs et un regain d’intérêt, en plus du rôle crucial qu’elle peut jouer dans le développement durable des territoires.

La politique urbaine algérienne ne pouvait pas rester à l’écart de cette dynamique. Depuis le début du 21ème siècle, l’État a opté pour une autre voie favorisant le développement local des métropoles, sous forme de nouvelles orientations dans la mission de l’aménagement du territoire, reconsidérant la gestion actuelle des villes algériennes (Boumaza, 2006). Cette démarche a été élaborée suite à un engagement de l’État dans le domaine des politiques de la ville (Sidi Boumedine, 2006) et s’est traduite par une série de lois et d’instruments, soucieux de la gestion et de la maîtrise de l’aménagement du territoire. Instauré par différents ministères et aboutissant à une nouvelle manière de fabrication et de gestion des villes, le rôle et les compétences des acteurs devaient être plus explicitement définis (Hafiane, 2011).

Dans ce cadre, le Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et du tourisme (MATET) a adopté plusieurs textes législatifs depuis 2001 : loi n° 01-20 du 12 décembre 2001 relative à l’aménagement et au développement durable du territoire, loi n°02-08 du 8 mai 2002 portant sur les conditions de création des villes nouvelles et de leur aménagement,  loi n° 03-10 du 19 juillet 2003 visant la protection de l’environnement dans le cadre du développement durable et, enfin, loi n° 06-06 du 20 février 2006 portant loi d’orientation de la ville avec ses actions de mise en œuvre. L’enjeu du renforcement de la métropolisation des quatre grandes villes algériennes(Alger, Oran, Constantine et Annaba) était au centre des préoccupations de cette nouvelle stratégie d’aménagement élaborée par l’Etat algérien (Berezowska-Azzag, 2011).  Un nouveau schéma stratégique voit le jour: le Schéma Directeur d’Aménagement de l’Aire Métropolitaine (SDAAM).

Oran, de par son statut de deuxième ville d’Algérie et capitale de l’Ouest algérien mais encore de par sa situation géographique stratégique sur le bassin méditerranéen, son poids démographique et son rôle renforcé sur le plan administratif se présente comme une métropole nationale de premier rang, pôle de convergence et d’attraction important sur l’ensemble de la région Ouest. Le SDAAM d’Oran fait, dès l’année 2006, l’objet de différentes études menées par le bureau d’études tunisien Dirasset, mais les résultats explorés a posteriori sont différents par rapport à ce qui a été envisagé a priori (Kadri, 2016).

Dix ans après le lancement de l’étude de ce schéma, avec l’arrivée d’un nouveau wali en 2005, il rencontre un blocage flagrant, induisant l’absence de toute stratégie d’avenir de la métropole et de vision prospective de son développement (Kettaf, 2013). À cet effet, notre questionnement porte sur les facteurs limitatifs ayant déterminé ou favorisé l’échec de la mise en œuvre du SDAAM Oranais. Partant de l’analyse documentaire des trois missions du SDAAM d’Oran ainsi que des entretiens réalisés avec les représentants du bureau d’étude responsable de l’étude de ce schéma et les différentes directions de la wilaya d’Oran, la présente contribution présente le SDAAM d’Oran, analyse ses treize Programmes d’Action Territoriale (PAT) et s’attarde sur les facteurs ayant déterminé les limites de sa mise en œuvre.

SDAAM, une stratégie de développement pour l’aire métropolitaine d’Oran ?

Le SDAAM est un instrument d’aménagement et de développement durable du territoire qui se substitue au Plan d’Aménagement de la Wilaya, pour les aires métropolitaines définies par le SNAT (loi 01-20, art. 7).En effet, le SDAAM d’Oran est présenté comme un outil fournissant une vision stratégique, à l’horizon 2025, aux autorités locales pour lesquelles il construit une base de données pour les aider dans la prise de décision. Il propose une logique de développement qui cherche à traiter les problèmes immédiats en les situant dans une perspective à long terme. Son enjeu final est de préparer la ville d’Oran et son aire métropolitaine à assumer les défis et mutations imposés par l’évolution du contexte international. À ce titre, les objectifs stratégiques du SDAAM se déclinent en termes de métropolisation de l’espace urbain et de durabilité de l’aménagement (Dirasset, 2011).

Le SDAAM aborde l’aménagement sur une base essentiellement fonctionnelle reposant sur une analyse physico-financière (Dirasset, 2011).Mais son champ demeure varié et concerne aussi bien le transport, l’habitat, les activités, les loisirs et l’environnement, dans leur dimension territoriale. Il s’intéresse, notamment, aux fonctions urbaines de toute l’aire métropolitaine, cherchant, dans le cadre du développement durable, un ciblage plus efficace de l’action publique et des politiques sociales sur son territoire (Berezowska-Azzag, 2011). Il cherche à optimiser les influences que la métropole développe sur son aire métropolitaine à travers la mise en place d’une stratégie présentant plusieurs objectifs : recherche de la maîtrise et de la cohérence  territoriale, renforcement de l’attractivité métropolitaine, développement de la compétitivité et ouverture internationale des grandes villes, réseaux d’infrastructures performants, nouvelles échelles de gouvernance et de coopérations territoriales, réseaux d’acteurs organisés autour de préoccupations et d’intérêts communs, etc. (Dirasset, 2011).

L’objectif auquel s’efforce d’aboutir le SDAAM est d’évaluer, en premier lieu, si Oran doit se contenter d’entrer dans le « club » des métropoles méditerranéennes et si elle peut prétendre accéder un jour dans la cour des métropoles internationales. Ensuite, l’intérêt porte sur l‘aménagement de l’aire métropolitaine d’Oran pour qu’elle soit en mesure de faire prospérer ses fonctions de la façon la plus efficace pour le développement de toute la région Nord-Ouest et de l’ensemble du pays.